L'erreur profonde de Benoît XVI... et de Sandro Magister ; ou la non-herméneutique de continuité de Vatican II avec le dogme catholique (1)


Author: admin-blog2 posted in Articles archivés (Blog) on 07-07-2020 09:47:00

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L'erreur profonde de Benoît XVI... et de Sandro Magister ;
ou la non-herméneutique de continuité de Vatican II
avec le dogme catholique
(1)
 
           
        Sandro Magister est un journaliste italien qui écrit dans L'Espresso, c'est un catholique de tendance conservatrice... à l'instar de notre pape Benoît XVI. Ses "billets du jour" sur tel ou tel sujet d'actualité ecclésiale brûlant peuvent être intéressants au niveau de l'info, mais, trop souvent, ils révèlent une pensée qui s'est rigoureusement interdite d'aller au fond du problème de "la crise de l'Église", d'investiguer avec intelligence et souci de la vérité dans ses causes théologiques premières véritables. Dès lors, le message journalistique de réaction contre les effets du mal ecclésial contemporain qu'il fait passer à ses lecteurs reste généralement dans l'obscurantisme des "vérités diminuées" qui ne libèrent pas l'âme catholique du mensonge universel contemporain... surtout quand il est ecclésial. Ô combien l'exclamation à la fois douloureuse et indignée du Psalmiste trouve écho en notre temps : "Sauvez-moi, Seigneur, car il n’y a plus de saint, parce que les vérités ont été diminuées par les enfants des hommes" (Ps XI, 1) ! À quoi peut bien servir en effet de dénoncer la fièvre si l'on a décidé de faire l'impasse sur l'identification du virus qui en est la cause ? L'effet et la cause de l'effet doivent être dénoncés en même temps et avec la même force si l'on veut libérer surnaturellement dans la vérité vraie en vérité les âmes, et la sienne propre pour commencer. Seule, en effet, la vérité intégrale a ce pouvoir spirituel de libérer vraiment l'âme fidèle (cette vérité intégrale, qui n'a rien à voir avec la vérité intégriste affectionnée par les tradis), c'est un pouvoir que Dieu n'a pas donné aux vérités diminuées des conservateurs, et pas plus aux vérités intégristes des tradis. Parce qu'avec Jésus-Christ, dont il est toujours bon de se remettre en mémoire active qu'Il est Lui-même, en Personne à la fois divine et humaine, la Vérité intègre et intégrale, c'est tout ou rien (la vérité en effet, n'est pas une idée, mais une personne vivante, celle de Jésus-Christ : "Je suis la Voie, la Vérité et la Vie" ― Jn XIV, 6).
           
        On n'est donc pas surpris de voir Sandro Magister, dans son dernier article L'archevêque Viganò au bord du schisme ― La leçon non-entendue de Benoît XVI, moult s'indigner de l'accusation que porte Mgr Viganò contre le concile Vatican II : un conservateur comme lui sait certes dénoncer, et il s'en fait d'ailleurs un grand devoir, les errements et déviations graves dans l'Église après Vatican II, mais s'interdit absolument d'en voir la racine dans le concile moderne, qu'il veut à toutes forces toujours continuer à voir comme sacro-saint !
           
        Mais voilà. Encore faudrait-il que les conservateurs qui vivent leur spiritualité dans les "vérités diminuées" apportent la preuve qu'il n'y a pas une relation immédiate et directe de cause à effet entre la lettre magistérielle elle-même dudit concile moderne et lesdits errements post-Vatican II, et... c'est là que le bât blesse.
           
        Dans son article, Sandro Magister se fait pourtant fort d'apporter cette preuve, qu'il voudrait croire établie et formelle, il va la chercher quasi manu militari dans les explications théologiques données par le pape Benoît XVI sur le sujet. Le pape Ratzinger, qui fut une cheville ouvrière très-active du concile moderne et qui en connaît à fond la structure intellectuelle et le déroulement interne, a en effet élaboré avec le plus grand soin toute une thèse pour "prouver" théologiquement que Vatican II est doctrinalement saint et sain, et qu'il ne saurait être la racine d'aucun des errements et déviances fort graves qui, évidemment par le plus grand des hasards, l'ont suivi très-immédiatement, quasi dès sa clôture, dans toutes les églises de l'orbe catholique universelle, y germinant et germant aussitôt peu ou prou comme chienlit prolifique.
           
        Or, le pape Benoît XVI se trompe absolument et complètement sur le point essentiel qui fonde tout son raisonnement prétendant laver Vatican II de toute hétérodoxie et de toute responsabilité première dans les errements et déviances post-conciliaires. C'est ce que je vais maintenant montrer, et pour que ma démonstration soit plus percutante, vraiment à l'emporte-pièce dans les âmes de bonne volonté (les âmes de mauvaise volonté, je m'en contref...), je vais la faire en suivant rigoureusement le raisonnement théologique qu'il a exposé et soutenu dans le grand détail devant tous les cardinaux, quelques jours avant son premier Noël pontifical, dans son Discours à la Curie romaine à l'occasion de la présentation des vœux de Noël, qu'on pourra trouver in extenso ici https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/speeches/2005/december/documents/hf_ben_xvi_spe_20051222_roman-curia.html
           
        À quelques jours près, ce Discours se situe à quarante ans de distance de la date de clôture de Vatican II (8 décembre 1965), et le pape Benoît en prenait occasion pour faire une rétrospective apologétique dudit concile moderne. Écoutons-le attentivement.
           
        "... Le dernier événement de cette année sur lequel je voudrais m'arrêter en cette occasion est la célébration de la conclusion du Concile Vatican II il y a quarante ans. Ce souvenir suscite la question suivante : Quel a été le résultat du Concile ? A-t-il été accueilli de la juste façon ? Dans l'accueil du Concile, qu'est-ce qui a été positif, insuffisant ou erroné ? Que reste-t-il encore à accomplir ? Personne ne peut nier que, dans de vastes parties de l'Église, la réception du Concile s'est déroulée de manière plutôt difficile".
           
        Convenons que c'est parler là à mots très-feutrés et même calfeutrés, qui sonnent plutôt fêlés parce qu'ils ne rendent pas vraiment le son exact de l'immense clameur réprobatrice qui a résonné tous azimuts dans le monde catholique contre le concile moderne, dès sa clôture. Mais continuons à tendre l'ouïe.
           
        "La question suivante apparaît : pourquoi l'accueil du Concile, dans de grandes parties de l'Église, s'est-il jusqu'à présent déroulé de manière aussi difficile ? Éh bien, tout dépend de la juste interprétation du Concile ou -comme nous le dirions aujourd'hui- de sa juste herméneutique, de la juste clef de lecture et d'application".
           
        Ainsi donc, la thèse est lancée, ou plutôt la poudre de perlimpinpin dans les yeux des fidèles : selon le pape Ratzinger, le problème de la mauvaise réception de Vatican II dans le monde catholique est uniquement dû à une question secondaire d'interprétation de la lettre magistérielle du concile moderne, mais nullement à une question première de défectuosité doctrinale de la lettre magistérielle elle-même. "TOUT dépend", dit-il, ce sont ses propres mots, d'une question d'interprétation de la lettre magistérielle conciliaire. Nous sommes là en plein mensonge, ou plutôt, je rectifie, en plein refus de conscientiser le problème théologique vrai posé par Vatican II (car je m'en voudrais de dire que le pape Ratzinger ment, ce qui suppose de la malice et de la coulpe de sa part, la vérité est qu'il s'abuse, trompé en toute innocence par "la puissance des ténèbres" dans laquelle toute l'Église est plongée et engloutie depuis qu'elle vit "LA PASSION DE L'ÉGLISE" -et ce n'est pas d'hier, et ça ne date pas du concile moderne... je vais y revenir- ; et il se trompe innocemment, à tout le moins au départ de cette tromperie dont il est victime dans les temps très-enthousiastiques mêmes de Vatican II, mais il refuse à présent d'en prendre conscience tellement il s'est engagé intellectuellement à fond du donf, et aussi hélas passionnellement, dans cette tromperie à l'époque du concile ; on ne peut que constater que Mgr Viganò, quant à lui, nous montre une âme qui a accepté très-humblement de prendre conscience de s'être laissé abuser par Vatican II et d'avoir été abusé durant de longues décennies post-conciliaires... mais pas Benoît XVI).
           
        Or, pour commencer, je vais montrer très-clairement que, fort loin que le problème posé par Vatican II soit une question d'interprétation des décrets magistériaux y promulgués, c'est au contraire une question de lettre magistérielle elle-même du concile qui est hérétique (et même pire que cela : apostate), en prenant un exemple très-simple que tout le monde pourra comprendre, dans le décret Nostra Aetate.
           
        ... Cher lecteur !, c'est en effet très-important, il faut, en tant que catholique, que vous preniez conscience VOUS-MÊME de l'hétérodoxie formelle de la lettre magistérielle elle-même du concile Vatican II.
           
        Ainsi, vous verrez où est la vérité, que tâchent d'occulter à toutes forces les conservateurs par un écran de fumée et en lançant des grenades fumigènes un peu partout, et vous plaindrez le pauvre pape Benoît XVI de continuer à vouloir s'abuser lui-même et abuser son prochain, en voulant toujours et encore croire que le problème de Vatican II est un problème d'interprétation et non point de lettre magistérielle elle-même. Les travaux pratiques que je vous propose pour cela vont être fort simples pour vous, vous n'avez juste qu'à ouvrir le lien suivant qui va vous mener directement au texte officiel de ce très-abominable décret conciliaire Nostra Aetate : http://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents/vat-ii_decl_19651028_nostra-aetate_fr.html
           
        ... Voilà ! Vous y êtes ? Vous avez sous les yeux le texte conciliaire lui-même signé et dûment promulgué par les 2 500 Pères-évêques de l'Église contemporaine una cum le pape Paul VI, c'est-à-dire théologiquement un avec lui.
           
        À présent, faites un peu dérouler le curseur et arrêtez-vous à : § 3. La religion musulmane. Et maintenant, lisez attentivement, dans la première ligne, la définition qu'osent faire les Pères de Vatican II de cette diabolique religion : "L’Église regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu unique, VIVANT ET SUBSISTANT".
           
        Vous pouvez vous arrêter de lire, il n'y a hélas pas besoin d'aller plus loin. On est obligé, là, de prendre acte et de constater que cette lettre magistérielle conciliaire vaticandeuse incroyable est tout simplement une abomination de la désolation dans le Lieu-Saint, lequel Lieu-Saint, ici, est rien moins que... DIEU LUI-MÊME. Oser professer que le "Dieu" musulman est VIVANT ET SUBSISTANT est un blasphème hérétique ou une hérésie blasphématoire, comme l'on veut, qui est rien moins qu'une véritable et monstrueuse apostasie. Le seul Dieu VIVANT ET SUBSISTANT est en effet, et on ne devrait pas avoir à rappeler une telle évidence dogmatique qu'un enfant du premier catéchisme rougirait de ne savoir point, le Dieu Un EN TROIS PERSONNES DIVINES révélé par Jésus-Christ et la Religion véritable, celle catholique. Or, nul ne l'ignore, sauf apparemment les Pères de Vatican II una cum le pape actuel (qui, prenons-en bien conscience, étaient, à Vatican II, tous les "membres enseignants" en corps d'institution d'une génération ecclésiale donnée, de soi en possession du charisme d'infaillibilité lorsqu'ils enseignent ordinairement l'universalité des fidèles...), nul ne l'ignore disais-je, le "Dieu" Allah adoré par les musulmans est un faux dieu qui n'existe pas, donc qui ne vit pas, qui ne subsiste pas, justement parce qu'ils rejettent et refusent explicitement et formellement dans leur foi coranique le dogme de la Trinité divine (mais le démon vient remplir le vide métaphysique qu'ils se sont créés). Il est donc vraiment tout ce qu'on veut, ce "Dieu" musulman, sauf... VIVANT ET SUBSISTANT !!! Oser dire du Dieu musulman UN SANS ÊTRE TROIS qu'il est VIVANT ET SUBSISTANT, c'est pire qu'une simple hérésie, un simple blasphème, c'est en vérité une apostasie inouïe du Dieu véritable.
           
        Or, je le répète, on est bien obligé de prendre acte que cette hérésie-apostasie affreuse et atroce se trouve dans la lettre magistérielle elle-même du concile Vatican II, au sens obvie et formel, le texte officiel que vous venez de lire, ô lecteur, en faisant foi.
           
        Mais reprenons maintenant le raisonnement que veut faire Benoît XVI pour empêcher son âme de prendre conscience de l'hétérodoxie viscérale du concile moderne dans sa lettre magistérielle elle-même : la cause de la mauvaise réception du concile Vatican II parmi les fidèles, affirme-t-il, ne réside pas dans la lettre magistérielle conciliaire, mais seulement dans l'interprétation faite de cette dite lettre. Fort bien ! Je vais m'astreindre avec peine, par respect pour le pape, à suivre le raisonnement de Benoît XVI. Je prends donc à mon compte la définition de Nostra Aetate du "Dieu" musulman qui serait soi-disant VIVANT ET SUBSISTANT, et veux me dire que c'est seulement une question d'interprétation pour bien entendre cette définition dans la Foi catholique. La "question suivante", comme dit Benoît XVI, est celle-ci : Quelle herméneutique dois-je choisir pour me donner l'interprétation de cette définition qui satisfasse la Foi catholique dont mon âme doit se nourrir pour être sauvée ?
           
        Si je lis l'explication théologique du pape Benoît dans la suite de son Discours, il donne deux herméneutiques principales possibles pour lire les doctrines professées dans le concile Vatican II : 1/ une grille d'interprétation de nouveauté théologique par rapport à la Tradition doctrinale, dite "herméneutique de discontinuité ou de rupture" ; 2/ une grille d'interprétation "de réforme dans la continuité de l'unique sujet-Église", qui, par la suite, par souci d'abréviation et aussi de simplification, a été appelée "herméneutique de continuité", ce qui est un raccourci théologiquement juste. Cette herméneutique de continuité dans Vatican II serait soi-disant, selon Benoît XVI, une présentation du Dépôt révélé certes adaptée à notre génération moderne mais en total respect de la Tradition doctrinale. Il s'agirait, ce qui est bien connu en théologie dogmatique, d'un désenveloppement homogène, d'un épanouissement orthodoxe du Dogme, dû à l'avancement des Temps vers le Royaume sous l'inspiration du Saint-Esprit, un peu comme un enfant puis un adolescent s'épanouit en homme adulte sans rien renier de ce qu'il est essentiellement dans sa personne humaine.
           
        Ensuite de son exposé des deux différentes herméneutiques possibles de Vatican II, notre pape conciliaire Benoît condamne bien sûr la première listée, l'herméneutique de rupture, qui consiste, selon lui, à donner aux mots magistériels employés dans Vatican II un contenu de Foi carrément nouveau, au sens théologique toujours très-négatif du qualificatif, c'est-à-dire formellement hétérodoxe, en non-accord et non-écho radicaux avec la Tradition doctrinale. L'herméneutique de rupture, qui, toujours selon lui, se réclamerait de l'esprit du concile plus que de sa lettre (mais c'est faux : l'herméneutique de rupture se réclame autant de la lettre favens haeresim de Vatican II que de son esprit), donnerait en fait à professer une Foi nouvelle qui, au moins en quelque point doctrinal fondamental, n'a pas de lien avec la Foi traditionnelle.
           
        Or, là, déjà, je m'arrête, je pile sec des deux pieds, je ne peux plus, en tant que catholique, suivre Benoît XVI dans sa tentative d'explication. Je suis en effet obligé de constater que notre pape conciliaire est théologiquement très-insuffisant et très-incomplet dans son exposé de la question, il oublie bougrement de dire une chose très-importante, qu'un théologien de sa trempe est vraiment fautif d'omettre, à savoir : théologiquement, il n'est pas normal, ou mieux dit, il est rigoureusement impossible de supposer, comme le fait notre pape conciliaire dans sa première hypothèse d'une herméneutique de rupture, qu'un texte magistériel authentique puisse contenir en soi, ex se, une possibilité de lecture favens haeresim, qui favorise l'hérésie, une lecture qui puisse permettre, précisément, une rupture avec la Tradition doctrinale. Un texte magistériel émanant authentiquement de l'Église-Épouse, comme le furent éminemment tous les décrets de Vatican II, ne peut JAMAIS être en effet, catholiquement parlant, une sorte de Janus à deux visages, dont l'un regarderait vers la Tradition, quand l'autre regarderait vers le modernisme. Et cependant, et pourtant, au rapport même de Benoît XVI lorsqu'il définit sa première grille de lecture des textes de Vatican II, c'est ce qu'on peut trouver dans le concile moderne : des textes magistériaux qui pourraient recevoir une lecture hétérodoxe (le cas le plus frappant étant le fameux subsistit in de Lumen Gentium pour définir l'Église catholique, qui peut en effet tout-à-fait être lu le plus hérétiquement du monde et satisfaire à une herméneutique de rupture totale avec la Tradition doctrinale). Cela est déjà, théologiquement, complètement anormal, ce que ne voit pas du tout Benoît XVI... ou qu'il ne veut absolument pas voir, s'étant mis des œillères très-opaques sur les yeux et point du tout le collyre du Saint-Esprit (Apoc III, 18), pour ne voir point la vérité vraie en vérité du concile moderne.
           
        Quant à lui, il se contente juste de condamner cette possible lecture hétérodoxe des textes magistériaux de Vatican II par l'herméneutique de rupture, mais sans dire qu'il est anormal au plus haut point et surtout théologiquement impossible, de pouvoir faire une lecture hétérodoxe de textes émanant du Magistère de l'Église réunie en concile général, de soi doté ipso-facto de l'infaillibilité par le mode ordinaire & universel. Cherchez en effet dans les conciles universels du passé ecclésial : aucun texte d'iceux-là ne permet la moindre lecture hétérodoxe des doctrines y promulguées dûment...
           
        Mais je réponds maintenant à la question que je me posais tout-à-l'heure : dans le panel des herméneutiques proposées par Benoît XVI aux fidèles pour lire Vatican II, quelle herméneutique dois-je choisir pour me donner la bonne interprétation de la définition du "Dieu" musulman dans Nostra Aetate, une interprétation qui satisfasse la Foi catholique dont mon âme doit se nourrir pour être sauvée ? Puisque Benoît XVI veut que la problématique de fond du concile moderne soit seulement une question d'interprétation de la lettre conciliaire ? Or, avec cette définition, c'est bien peu dire que je suis là en présence d'un texte magistériel vaticandeux qui peut recevoir une lecture hétérodoxe par l'herméneutique de rupture à côté d'une lecture qui puisse en être aussi bien faite dans l'orthodoxie, par l'herméneutique de continuité ! La vérité, c'est que cette définition du "Dieu" musulman de Nostra Aetate NE permet QU'une lecture, et hélas, trois & trine fois hélas, il s'agit de la mauvaise et hérétique lecture, celle faite par l'herméneutique de... rupture ! En effet, je ne peux pas, moi catholique, lire que Allah est un Dieu VIVANT ET SUBSISTANT autrement qu'en me coupant radicalement, in radice, de la Foi catholique, laquelle professe au contraire formellement qu'un Dieu Un qui n'est pas en Trois Personnes divines ne peut rigoureusement pas être le vrai Dieu VIVANT ET SUBSISTANT. Si donc on me fait professer qu'un Dieu Un qui n'est pas Trine est lui aussi VIVANT ET SUBSISTANT, cela me fait attenter le plus directement possible à la Foi catholique et en plus, singulièrement blasphémer le vrai Dieu, Père, Fils & Saint-Esprit. Exactement contrairement donc à ce que veut professer Benoît XVI, il y a des textes vaticandeux qui ne peuvent être lus qu'avec l'herméneutique de rupture... car je rappelle que je n'ai pris ici que le plus simple exemple possible d'une mauvaise lettre magistérielle conciliaire en soi, ex se, qui peut hélas être beaucoup multiplié dans Vatican II.
           
        Le pape Benoît XVI veut en effet professer qu'on puisse donner aux textes du concile moderne deux herméneutiques, l'une de rupture avec la Tradition doctrinale, l'autre de continuité avec la Tradition doctrinale, mais la première, de rupture, serait toujours mauvaise et ne doit jamais être suivie, quand la seconde est toujours la seule bonne. Alors, je lui pose la question : comment veut-il que, par l'herméneutique de continuité qu'il me dit être la seule bonne herméneutique pour lire les textes de Vatican II, je lise dans la Foi que le "Dieu" musulman qui n'est pas Un en Trois Personnes divines, soit VIVANT ET SUBSISTANT ? Comment une telle définition peut-elle être une continuation, un désenveloppement doctrinal orthodoxe, que l'avancement de l'Histoire et le Saint-Esprit auraient soi-disant permis dans l'Église le 28 octobre 1965, du dogme catholique qui professe que le seul Dieu VIVANT ET SUBSISTANT est un Dieu Un en Trois personnes divines sinon rien ? Le noir ne peut pas révéler le blanc ; la négation d'une chose ne peut pas, par désenveloppement intrinsèque épanoui voire arrivé à maturation complète, arriver à professer positivement cette dite chose, car elle y est opposée antinomiquement. Avec la définition du "Dieu" musulman dans Nostra Aetate, nous sommes donc là en présence d'une contradiction formelle et antinomique avec la Foi catholique, absolument irréductible. La lecture des textes conciliaires de Vatican II par l'herméneutique de continuité, que Benoît XVI veut être la seule valable, s'avère donc ici radicalement IMPOSSIBLE.
           
        On est donc bien obligé, avec cette définition de Nostra Aetate du "Dieu" musulman, de prendre acte que c'est LA LITTÉRALITÉ MÊME DU TEXTE MAGISTÉRIEL DE VATICAN II qui est en opposition antinomique formelle avec la Foi catholique. Car si l'herméneutique de continuité est impossible à employer pour la définition du "Dieu" musulman dans Nostra Aetate, ne reste donc plus possible pour cette définition vaticandeuse, et en suivant le raisonnement même du pape Benoît XVI, que l'herméneutique de rupture. Et justement, il en est significativement bien ainsi : non seulement, comme je viens de l'exposer, il est possible de soutenir cette herméneutique de rupture avec la définition du "Dieu" musulman qui est faite dans Nostra Aetate, mais la vérité est que c'est SEULEMENT avec cette herméneutique de rupture qu'on peut la lire. Mais si c'est la SEULE herméneutique de rupture qui rend le compte théologique exact de ladite définition du "Dieu" musulman dans le concile moderne, alors cela signifie formellement que c'est la lettre même du Magistère vaticandeux qui est hérétique en soi, ex se. Cqfd, malheureusement. Je défie quiconque, à commencer par Sandro Magister, de pouvoir prouver théologiquement le contraire.
 
        La thèse de Benoît XVI qui veut faire de Vatican II une problématique d'interprétation et non de lecture, est donc archi-fausse, archi-controuvée...
           
        On ne saurait donc s'étonner que cette présence indubitable de l'hérésie formelle dans la littéralité obvie même des décrets magistériaux de Vatican II, et donc une rupture complète et radicale du concile moderne avec la Foi et la Tradition doctrinales de l'Église, ait fort bien été perçue par les esprits modernistes dans l'époque même où le concile se déroulait, et, ... comme on les comprend !, ils ne se sont certes pas fait faute ni scrupule de la dénoncer vertement et publiquement, de la clamer à tous vents ! "Si tu veux te connaître, va chez ton ennemi" dit un proverbe chinois. C'est un proverbe rempli de sagesse. Nos amis en effet, soit par peur soit par respect, ont tendance à ne pas nous dire la vérité intégrale sur nous-même, ils enrobent leur pensée sur nous de flatterie bien souvent ; mais, par haine, nos ennemis, au contraire, vont tout-de-suite à la jointure de notre faille pour hautement la dénoncer... et c'est finalement précieux pour l'avancement même de notre sanctification. Éh bien, mais, alors, ne rechignons pas, allons-y franc de port chez nos ennemis, pour connaître la VÉRITÉ sur Vatican II...!
           
        Voyez par exemple comment Hans Küng, le théologien moderniste tristement célèbre, commentait le fameux subsistit in du décret Lumen Gentium par laquelle définition conciliaire l'Église catholique n'était plus dite être la seule et unique Épouse du Christ, définition de l'Église aussi ouvertement hérétique que la définition faite dans Nostra Aetate du "Dieu" musulman. Il triompha immédiatement après le vote vaticandeux des Pères promulguant Lumen Gentium, et expliqua : "[Par cette définition conciliaire] l'Église catholique ne s'identifie plus seule à l'Église du Christ : le Concile a fait sur ce point une révélation formelle". Par ailleurs, précisons qu'on retrouve cette même formule hérétique dans plusieurs autres textes de Vatican II, ce qui prouve qu'elle est rien moins qu'anodine, qu’elle n’est pas non plus un innocent et accidentel lapsus calami qu'il serait pharisaïque d'épingler (c'est bien au contraire la pointe d'un iceberg subversif redoutable...), on la trouve par exemple dans la Liberté religieuse, au § 1 : "Cette unique vraie religion, nous croyons qu'elle subsiste dans l'Église catholique". Le sous-entendu hérétique est clair : si elle subsiste dans l'Église catholique, elle peut aussi subsister ailleurs, par exemples dans des "groupes religieux", comme les Pères de Vatican II oseront nommer de cette manière théologiquement si indécente les sectes non-catholiques dans la Liberté religieuse, au § 4...
           
        Ce constat formel de rupture radicale des doctrines de Vatican II avec la Tradition et la Foi catholiques se trouve encore, et même éminemment, dans le fameux décret sur la Liberté religieuse : "Il suffit, dit toujours et hélas à fort juste titre notre hérétique de service, Hans Küng, de comparer le document doctrinal autoritaire des années soixante du siècle dernier, paru immédiatement avant Vatican 1er, le Syllabus publié en 1864, avec les documents doctrinaux de Vatican II des années soixante de notre siècle, pour se rendre compte aussitôt que c'est uniquement par les méthodes du totalitarisme partisan ("car le parti a toujours raison"), qu'on a pu parvenir à transformer toutes les contradictions en un développement logique. Il n'y a plus développement là où c'est le contraire qui est expressément affirmé... L'assentiment à la liberté de religion donné par Vatican II n'est ni explicitement ni implicitement contenu dans la condamnation de la liberté de religion par Pie IX. On ne peut pas non plus s'esquiver en disant que les temps ont tellement changé et qu'on a alors voulu condamner que les excès négatifs de la Liberté religieuse [... c'est exactement le faux et mensonger argument que va prendre Benoît XVI pour justifier la Liberté religieuse, comme on va le voir tout-à-l'heure...]. Il suffit de lire les condamnations elles-mêmes du Syllabus : «De notre temps, il ne convient plus de reconnaître la religion catholique comme seule religion d'État, à l'exclusion de toutes les autres formes de culte envers Dieu (77e proposition, CONDAMNÉE)» ; «Il est donc louable que certains pays catholiques prévoient légalement que les immigrants aient le droit de pratiquer publiquement leur religion quelle qu'elle soit (78e proposition, CONDAMNÉE)» ; «Car il est faux que la liberté civile de religion, comme la pleine faculté accordée à tous de manifester librement et publiquement n'importe quelles opinions et idées, conduise aisément à la corruption de l'esprit et des mœurs des peuples et à l'extension de la peste de l'indifférentisme (79e proposition, CONDAMNÉE)»" (Être vrai, l'avenir de l'Église, Hans Küng, 1968). On ne saurait, hélas, mieux dire, c'est plutôt foudroyant...
           
        Neuf ans plus tard, après "l'été chaud 1976" qui vit Mgr Marcel Lefebvre monter au créneau pour défendre la Foi contre les hérésies de Vatican II, notre clairvoyant hérétique moderniste commentait ainsi ne varietur "la crise de l'Église", désormais en état non-soigné d'abcès ouvert et purulent : "Lefebvre a tout-à-fait le droit de remettre en cause la déclaration conciliaire sur la Liberté religieuse, parce que, sans donner d'explication, Vatican II a complètement renversé la position de Vatican 1er. Il n'y a plus développement là où c'est le contraire qui est expressément affirmé" (extrait d'une interview de Hans Küng publiée dans National Catholic Reporter du 21 octobre 1977). D'autres mauvais larrons modernistes ne manquèrent pas de poser le même constat qui, pour eux, était une grande victoire. Ainsi le dominicain P. Congar : "Ce qui est nouveau dans cette doctrine [de la Liberté religieuse] par rapport à l'enseignement de Léon XIII et même de Pie XII, bien que le mouvement s'amorçât alors, c'est la détermination du fondement propre et prochain de cette liberté [religieuse], qui est cherchée non dans la vérité objective du bien moral ou religieux, mais dans la qualité ontologique de la personne humaine" (cf. Études & documents, Secrétariat de l'Épiscopat français, bulletin du 15 juin 1965, n° 5, p. 5). C'est effectivement très-exactement là que se situe l'hérésie de la Liberté religieuse : mettre l'homme à la première place, avant la Vérité qui est Dieu par la Personne divino-humaine de Jésus-Christ, et donc avant Dieu Lui-même. Le R.P. John Courtney Murray, autre expert américain progressiste très-actif au concile Vatican II, n'aura pas une autre analyse : "Presque exactement un siècle plus tard, la déclaration sur la Liberté religieuse semble affirmer comme doctrine catholique ce que Grégoire XVI considérait comme un délire, une idée folle. Tels sont les termes du problème". Voilà qui rejoint les propos de Hans Küng ; et l'on ne saurait certes mieux conclure, en effet : "Tels sont les termes du problème".
           
        Il est triste de devoir commenter ici que le prophète de Yahweh Sabaoth qui dit publiquement la vérité au peuple de Dieu sur Vatican II, et donc sur l'Église Universelle qui l'a dûment promulgué, s'avère être... l'hérétique, l'ânesse de Balaam, qui triomphe en faisant remarquer avec force et grande justesse d'analyse que seule l'herméneutique de rupture rend théologiquement le vrai compte des doctrines professées dans Vatican II : le concile moderne enseigne et professe à l'universalité des fidèles de l'orbe catholique une nouveauté doctrinale en complète opposition avec la Tradition de la Foi. ET VOILÀ LA VÉRITÉ VRAIE EN VÉRITÉ DU CONCILE MODERNE (cela me rappelle que dans la question du Ralliement, comme je le faisais remarquer dans mon précédent article, seuls les ennemis républicains français de 1880 et post savaient rappeler la vérité vraie en vérité dans la crise de la Séparation de l'Église et de l'État, à savoir que la République post-révolutionnaire en France était constitutionnellement antichrétienne, et que, là encore, le pape, Pie X en l'occurrence, saint Pie X s'il vous plaît, se trompait bougrement en voulant croire que ladite République pouvait être... chrétienne ― O tempora ! O mores ! Ce sont donc les grands guides spirituels commis par Dieu pour diriger les peuples qui sont, dans la période moderne, ... fussent-ils saints en leur for privé, ô contradiction !, les plus aveuglés de tous les hommes, tant sur la chose politique constitutionnelle qui a trait aux Mœurs, que dans la chose doctrinale qui a trait à la Foi...).
           
        Voilà en tous cas une vérité qui révulse complètement les conservateurs, qui leur fait pousser des cris d'orfraie et dont ils ne veulent absolument pas. Le pape Benoît XVI, actuellement leur chef de file, s'insurge hautement, et Sandro Magister derrière et avec lui, contre ce constat d'hérésie formelle dans la littéralité même des décrets de Vatican II. Écoutons-le encore attentivement, dans son Discours proféré quelques jours avant la Noël 2005, tâcher d'esquiver cette grande vérité qui condamne au feu de l'enfer le concile moderne, et voyons comment il s'y prend pour refuser d'enregistrer ce constat d'hétérodoxie formelle de la lettre magistérielle elle-même de Vatican II :
           
        "À l'herméneutique de la discontinuité [ou rupture] s'oppose l'herméneutique de la réforme [ou de continuité] comme l'ont présentée tout d'abord le Pape Jean XXIII, dans son discours d'ouverture du Concile le 11 octobre 1962, puis le Pape Paul VI, dans son discours de conclusion du 7 décembre 1965. Je ne citerai ici que les célèbres paroles de Jean XXIII, dans lesquelles cette herméneutique est exprimée sans équivoque, lorsqu'il dit que le Concile «veut transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation» et il poursuit : «Notre devoir ne consiste pas seulement à conserver ce trésor précieux [du Dépôt révélé de la Foi], comme si nous nous préoccupions uniquement de l'antiquité, mais de nous consacrer avec une ferme volonté et sans peur à cette tâche, que notre époque exige... Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d'une façon qui corresponde aux exigences de notre temps. En effet, il faut faire une distinction entre le dépôt de la foi, c'est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine, et la façon dont celles-ci sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée» (S. Oec. Conc. Vat. II Constitutiones Decreta Declarationes, 1974, pp. 863-865)".
           
        Commençons par dire que cette citation de Jean XXIII est roborative et fort intéressante. Elle l'est en effet, mais pas du tout pour ce que croit Benoît XVI, elle l'est en ce seul sens précis qu'elle manifeste fort bien la bonne motivation et la bonne volonté morale des Pères dans Vatican II. Et il faut dire que cela procure un grand soulagement spirituel pour l'âme catholique. Effectivement, contrairement aux tradis intégristes de préférence sédévacantistes qui veulent croire pharisaïquement que les décrets magistériaux hérétiques de Vatican II ont été faits par les Pères conciliaires avec mauvaise motivation de promouvoir sciemment l'hérésie (ce qui leur permet bien sûr de poser subséquemment un jugement d'illégitimité : les papes conciliaires ne sont pas papes parce qu'ils ont promulgué des hérésies à Vatican II avec malice et advertance, en toute connaissance de mauvaise cause ; mais la prémisse très-fausse de leur raisonnement les conduit à une conclusion encore plus fausse...), on a ici, dans la déclaration du pape Jean XXIII à laquelle fera écho le pape Paul VI dans son discours de clôture du concile, la preuve formelle de la bonne intention desdits Pères de Vatican II. Dont acte sur papier timbré.
           
        Et c'est certes extrêmement important de prendre bon acte de cette bonne motivation qui assure que les Pères vaticandeux ont promulgué leurs décrets hérétiques en toute inadvertance des graves hérésies voire apostasies commises par eux dans le concile moderne. Car cela permet de comprendre que l'Épouse du Christ, par ces actes magistériaux défectueux qui l'engagent elle-même, est mise seulement dans le péché matériel d'hérésie et non dans le péché formel (ce qui du reste est évidemment rigoureusement impossible, sans avoir à en conclure que "les portes de l'enfer ont prévalu contre l'Église"), la mettant donc ainsi dans l'économie de la Passion que saint Paul définit de cette manière : "Le Christ a été fait péché pour notre salut" (II Cor V, 21), un péché, faut-il le dire, simplement matériel et sans coulpe aucune, ce qui est une situation de "si grande contradiction" (He XII, 3), autre définition de saint Paul de l'économie de la Passion du Christ. Comme donc, dans Vatican II (cf. mon exposé complet sur "LA PASSION DE L'ÉGLISE" au lien suivant : https://www.eglise-la-crise.fr/images/pdf.L/ExposePassionEglise2.pdf).
           
        Ce premier point est très-important, certes. Mais le pape Benoît XVI en tire une déduction totalement fausse, que voici : puisque les Pères vaticandeux ont eu une bonne motivation de vouloir transmettre aux fidèles de l'ère moderne le bon Dépôt révélé de la Foi, alors cela prouve ipso-facto, par le fait même, que l'herméneutique de continuité est la seule grille de lecture à faire des doctrines promulguées dans Vatican II ; le concile lui-même ne peut qu'être bon dans ses actes magistériaux à cause même de la bonne motivation des Pères. Benoît XVI oublie là une seule chose, mais elle va détruire tout son raisonnement : je peux avoir une très-bonne motivation de vouloir faire une bonne chose, et puis, cependant, au moment de l'action, n'arriver à faire qu'une très-mauvaise chose... sans même en prendre aucunement conscience (du moins, en la commettant dans le moment présent de l'action, de l'agir ; parce qu'après, normalement, ma conscience, sous l'action du Saint-Esprit, doit, tôt ou tard, peu et puis prou, prendre conscience que j'ai mal agi).
           
        C'est en effet une chose de dire que la motivation des Pères de Vatican II est bonne, dont acte dans la joie, mais c'en est une tout autre de dire que les actes commis par lesdits Pères avec cette bonne motivation, sont bons en eux-mêmes par le seul fait de cette dite bonne motivation, comme Benoît XVI en fait le très-faux raisonnement. Mais on le voit passer à pieds joints sur ce très-important distinguo, et soutenir indûment que la bonne motivation des Pères de Vatican II suffit à prouver à elle seule que les actes magistériaux de Vatican II ne peuvent qu'être bons et ne pouvoir être lus que par l'herméneutique de continuité (= "Je ne citerai ici que les célèbres paroles de Jean XXIII, dans lesquelles cette herméneutique [de continuité] est exprimée sans équivoque, lorsqu'il dit que le Concile «veut transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation»", dit Benoît XVI ; or, c'est faux, Jean XXIII ne fait, dans sa déclaration que dire vouloir respecter cette herméneutique de continuité, mais cette dite herméneutique n'en est pas pour autant et par le fait même, ipso-facto, comme le suppose très-faussement Benoît XVI, mise en oeuvre concrète et exprimée sans équivoque dans les actes de Vatican II...).
           
        Son raisonnement est donc parfaitement faux. Benoît XVI fait là l'économie d'une démonstration, mais il n'a pas le droit : il faut nécessairement et impérativement faire la démonstration que les actes de Vatican II suivent la bonne motivation des Pères conciliaires pour pouvoir légitimement soutenir qu'ils ne peuvent être lus qu'avec l'herméneutique de continuité. Or, les actes concrets de Vatican II infirment au contraire formellement cette démonstration, ils sont, comme ont vient de le voir succinctement par quelques exemples qui pourraient être beaucoup multipliés, mauvais, quand bien même la motivation des Pères conciliaires est bonne. Cette situation n'est pas du tout impossible, sur le plan de la théologie morale. Je prendrai ici pour l'illustrer le simple mais percutant exemple de Saül avant sa conversion : il avait très-bonne motivation en persécutant les chrétiens jusqu'à les faire mourir (d'ailleurs Jésus-Christ Lui-même enregistre dans les persécuteurs juifs des chrétiens cette bonne motivation puisqu'Il prophétise : "Ils vous chasseront des synagogues, et l'heure vient où quiconque vous fera mourir croira rendre hommage à Dieu" ― Jn XVI, 2), et cependant, bien sûr, Saül commettait là, en persécutant les chrétiens avec bonne motivation, des actes très-mauvais par lesquels, faut-il le dire, il ne rendait pas du tout hommage à Dieu. C'est la même problématique de théologie morale pour les Pères de Vatican II : ils ont fait le pire du pire en croyant vraiment faire le mieux du mieux (c'est singulièrement le cas pour un certain Joseph Ratzinger...).
           
        Dans cette question très-importante, Benoît XVI a en fait juste oublié de bien lire ce que dit son prédécesseur Jean XXIII : "Le Concile VEUT transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation". Si fait, fort bien, le concile veut, on s'en réjouit sincèrement. Mais... l'a-t-il fait ? Est-ce qu'il a fait ce qu'il a dit vouloir faire ? L'acte conciliaire a-t-il suivi le vouloir conciliaire ? Encore une fois, la réponse, enregistrée indubitablement et indiscutablement dans les annales ecclésiastiques modernes, est NON. Non, Vatican II n'a pas fait ce qu'il a voulu faire dans le concile. L'acte magistériel du concile enregistre en effet tout au contraire une rupture formelle avec la Tradition et la Foi catholiques.
           
        Mais le pape conciliaire Benoît veut que ce bon vouloir des Pères de Vatican II soit automatiquement synonyme d'un bon faire, l'acte magistériel bon ayant, selon lui, suivi obligatoirement et parfaitement le bon vouloir originel, voire même étant prouvé par ce seul bon vouloir. Il est là dans une erreur complète, sur le seul plan de la théologie morale sans même rentrer dans les travaux pratiques de Vatican II. Je vais maintenant montrer toute la fausseté de la démonstration de Benoît XVI appliquée au décret de la Liberté religieuse, qu'il prend comme exemple qui prouverait soi-disant que l'acte conciliaire bon a effectivement suivi le vouloir conciliaire bon. Mais, avant cela, continuons à le suivre dans ses très-faux raisonnements :
           
        "Paul VI, dans son discours lors de la clôture du Concile, a ensuite indiqué une autre motivation spécifique pour laquelle une herméneutique de la discontinuité pourrait sembler convaincante. Dans le grand débat sur l'homme, qui caractérise le temps moderne, le Concile devait se consacrer en particulier au thème de l'anthropologie. Il devait s'interroger sur le rapport entre l'Église et sa foi, d'une part, et l'homme et le monde d'aujourd'hui, d'autre part (ibid. pp. 1066, sq). La question devient encore plus claire, si, au lieu du terme générique de «monde d'aujourd'hui», nous en choisissons un autre plus précis : le Concile devait définir de façon nouvelle le rapport entre l'Église et l'époque moderne".
           
        Effectivement, c'était exactement la tâche que devait remplir Vatican II : présenter la Foi à l'homme d'aujourd'hui. Mais... quel est-il, cet homme d'aujourd'hui ? En quel état spirituel est-il devant Dieu ? Or, la réponse à cette question est très-mal vue par les modernes, parmi lesquels on va voir se ranger le pape Benoît. Nous allons maintenant rentrer au cœur du problème théologique de notre temps, certes passionnant mais fort délicat, qui consiste beaucoup plus dans l'anthropocentrisme que dans l'anthropologie. Car la question est en effet beaucoup moins anthropologique (= qui a trait à la science de l'homme) comme le formule Benoît XVI, qu'anthropocentrique (= qui ramène tout à l'homme).
 
 
À suivre, dans la deuxième page :
L'erreur profonde de Benoît XVI... et de Sandro Magister ;
ou la non-herméneutique de continuité de Vatican II
avec le dogme catholique
(2)
 
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